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Contrefaçon de logiciel : l’originalité, un fardeau trop pesant ?

Contrefaçon de logiciel : l’originalité, un fardeau trop pesant ?

01-07-2025

Initialement conçu pour protéger les œuvres culturelles comme les écrits, la musique ou les arts visuels, le droit d’auteur – relevant de la propriété littéraire et artistique – a été pensé comme un outil dédié à des modes d’expression offrant une grande liberté créative à l’auteur. L’entrée relativement récente des logiciels dans son champ d’application a introduit une certaine tension : œuvres techniques par nature, les logiciels répondent à des contraintes techniques qui contrastent avec l’esprit originel d’un droit pensé pour la création libre.

Cette tension s’observe notamment lorsque l’auteur d’un logiciel engage une action en contrefaçon, et doit faire la démonstration de l’originalité. Cette démonstration n’est pas facile à apporter, comme l’a rappelé une décision du Tribunal judiciaire de Paris du 2 avril 2025.

La société Minebea Intec France (ci-après « la société Minebea »), spécialiste des instruments de mesure et de contrôle dans le domaine du pesage industriel, a fait assigner la société Lead'Up en contrefaçon de droit d'auteur de neuf de ses logiciels. La société Lead’Up conteste l’originalité des logiciels.

Le tribunal rappelle la jurisprudence française en matière d’originalité des logiciels : pour s’en prévaloir, l'auteur doit « faire preuve dans sa réalisation d'un effort personnalisé allant au-delà de la simple mise en œuvre d'une logique automatique et contraignante, la matérialisation de cet effort résidant dans une structure individualisée », et pour ce faire, « produire les éléments de nature à justifier de l’originalité de ses composantes, telles que les lignes de programmation, les codes sources ou du matériel de conception préparatoire ».

En soutien de cette démonstration d’originalité, la société Minebea produit un certain nombre de documents.

Pour sept des neuf logiciels, les seuls documents produits sont des fiches de présentation, des notices d’utilisation, d’installation ou d’administration, de la documentation commerciale, des exemples de choix opérés par l’auteur : d’après le tribunal, « aucun élément de nature à justifier de l’originalité ».

Pour les deux logiciels restants, la société Minebea produit des spécifications techniques détaillées, un tableau de bord, et un cahier des charges. Ayant inspecté ces documents, le tribunal estime que la société Minebea « se contente de lister leurs fonctionnalités », de « faire état de choix entre plusieurs solutions de développement dont aucune n’est propre à l’un d’eux ou aux deux », de décrire des « fonctionnalités attendues », et de conclure que ces informations sont « impropres à caractériser l’originalité de ces logiciels ».

Faute de démontrer l’originalité de ses logiciels, la société Minebea est donc déboutée de ses demandes fondées sur des faits de contrefaçon.

Une issue familière : entre juin 2024 et juin 2025, les juridictions françaises ont rendu six décisions dans lesquelles sont examinées l’originalité d’un ou plusieurs logiciels. Dans chacune d’elle, les demandeurs ont échoué à démontrer l’originalité requise, et se sont ainsi vu refuser la protection au titre du droit d’auteur.

Au centre du modèle économique de nombre de sociétés, le logiciel ne bénéficie d’une protection par le droit d’auteur que lorsque son originalité est clairement démontrée : une exigence qui, en pratique, reste difficile à satisfaire.

Pour anticiper cette difficulté et sécuriser vos droits, nos experts IPSILON réalisent des audits visant à analyser et documenter l’originalité de vos logiciels. Cliquez ici pour en savoir plus.

Notre expert

Louis KELLER

CPI Brevets
Strasbourg Mulhouse

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