PORTO, DOURO, CHAMPAGNE… ces noms évoquent une qualité liée à une origine et sont, à ce titre, extrêmement protégés. Il ne suffit pas de les copier pour se faire sanctionner. Il suffit... de les évoquer.

La protection des indications géographiques enregistrées au niveau de l’Union européenne a pour objectif de garantir aux consommateurs que les produits qui en sont revêtus, présentent certaines caractéristiques liées à leur origine. Elle vise également à protéger les producteurs qui se plient à des cahiers des charges exigeants et sont légitimes à tirer profit de ces efforts.

Aussi, on comprend naturellement que les appellations d’origine / indications géographiques soient protégées contre toute utilisation pour des produits (comparables) ne respectant pas le cahier des charges ou contre des usages exploitant leur réputation.

Mais la protection ne s’arrête pas là puisque les textes interdisent également leur simple évocation et ce même si, dans certains cas, elle ne parait pas volontaire. C’est ce qu’a pu constater le déposant d’une marque LEAO D’OURO (le LION D’OR en portugais), la couleur de son félin rappelant, pour l’EUIPO, trop évidemment la célèbre vallée vinicole portugaise.

En effet, la Chambre des recours de l’EUIPO a confirmé, dans sa décision R2479/2024-4 du 3 juin dernier, que la marque LEAO D’OURO, déposée pour des « services de restauration » ne pouvait pas être enregistrée sans porter atteinte à cette indication géographique. 

La Chambre rappelle que la notion d’« évocation » recouvre une hypothèse dans laquelle le consommateur, en présence du nom du produit, est amené à avoir à l’esprit, comme image de référence, la marchandise bénéficiant de cette dénomination.

Une telle évocation peut être reconnue alors même qu’il n’existe pas de risque de confusion : il suffit qu’il soit démontré que le public sera susceptible d’établir un lien entre la marque contestée et l’indication protégée, que ce lien soit volontairement recherché, ou purement fortuit.

Aussi, cette situation est possible dans le cas où le signe contesté reprend une partie de l’indication géographique, ou un terme similaire, mais est également possible alors même que les termes sont tout à fait distincts. Il a pu être jugé que la marque Glen Buchenbach évoquait l’indication Scotch Whisky, le terme GLEN étant fortement associé à l’Ecosse et son usage pour un whisky allemand créer un lien pour les consommateurs.

En l’espèce, la Chambre considère que le public non-lusophone associera les termes DOURO et D’OURO et que la présence du terme LEAO, pour qui il n’a pas de signification particulière, ne permet pas d’éviter cette association.

Elle estime également que les services de restauration et les vins protégés sont suffisamment similaires tant parce que les premiers sont proposés dans le cadre de la prestation des seconds que parce qu’il n’est pas rare que les producteurs de vins offrent également des services de restauration.      

La Chambre conclut donc sans ambiguïté que la marque contestée constitue une évocation illicite de l’IG DOURO et ne saurait être enregistrée pour les services visés.

S’il existe des situations où la volonté du déposant de profiter, par une subtile évocation, de la renommée d’une IG (on pense notamment à la récente décision sanctionnant la marque PRISSECO pour son évocation du pétillant italien), il semble parfois, comme dans cette affaire, que le déposant soit tombé sur un obstacle qu’il n’avait pas anticipé.

Cette affaire rappelle que les obstacles à l'enregistrement d'une marque sont nombreux et que l'évocation, même involontaire, d'une IG peut suffire à faire échec à une demande. La simple évocation d’une indication géographique en est un. Nos experts IPSILON vous accompagnent pour anticiper ces risques !